Améliorer la qualité de vie et les conditions de travail (QVCT) des salariés et, en corollaire, la fidélisation et l’attractivité de l’entreprise : voici le double objectif de l’accord signé le 3 février dernier (photo ci-contre) entre la direction de la Régie autonome des transports parisiens (RATP ; environ 46 000 salariés) et trois organisations syndicales (CFE-CGC, FO et UNSA).
« Au terme d’une négociation au long cours avec la participation active de nos équipes militantes pluridisciplinaires, le texte signé est un "accord-cadre" général qui acte des engagements structurants pour lesquels nous serons très vigilants quant à la mise en application par la direction », résume Fabien Renaud (debout au second plan, derrière Jean Castex), administrateur salarié CFE-CGC et président de la CFE-CGC Groupe RATP, première organisation syndicale de l’entreprise dans son champ catégoriel de l’encadrement (agents de maîtrise et cadres) avec 31,70 % de représentativité.
QVCT, semaine de 4 jours : la CFE-CGC RATP signe un accord ambitieux
Test de la semaine de 4 jours, parcours salarié-logé, conditions de travail : l’accord conclu à la RATP avec les partenaires sociaux fixe de solides objectifs. Décryptage avec Fabien Renaud, président de la CFE-CGC Groupe RATP.
EXPÉRIMENTATION DE LA SEMAINE DE 4 JOURS
L'expérimentation du dispositif a commencé le 18 janvier 2024 et concerne 4 lignes (5, 7 et 9 du métro et le RER B), sans diminution du temps de travail. 170 agents se sont portés volontaires pour tester la semaine de 4 jours pendant une première phase de 42 jours, éventuellement renouvelable. Le dispositif concerne les agents en station mais pas les conducteurs. Il prévoit une organisation hebdomadaire pour les manageurs et les contrôleurs avec 4 jours travaillés et 3 jours de repos, moyennant une augmentation du temps de travail quotidien d'une heure et quinze minutes. Les agents d'accueil en station et en gare travailleront sur un cycle de 4 jours suivis de 2 jours de repos, sans augmentation du temps de travail quotidien. Le dispositif donnera lieu à un retour d'expérience pour savoir s'il est étendu ou non.
L’analyse de Fabien Renaud, président de la CFE-CGC Groupe RATP
« En écho aux récentes annonces gouvernementales sur la semaine de 4 jours, le président de la RATP Jean Castex a demandé aux organisations syndicales de reprendre les discussions sur le sujet. La CFE-CGC a fait valoir que le dispositif, qui ne s’applique pas à tous les métiers, n’est pas une baguette magique. Pour potentiellement l’appliquer efficacement à tous les salariés de l’entreprise à terme, il est indispensable, en amont, d’aménager les organisations du travail en termes de charge de travail, d’embauches et de charge mentale, en particulier pour les manageurs qui doivent à la fois assurer la production et encadrer leurs équipes. D’où cette première phase d’études de faisabilité et d’expérimentations avant d’éventuellement généraliser le dispositif. Le sujet suscite de fortes attentes, y compris dans les populations de l’encadrement, et il ne faut donc pas se lancer tête baissée. »
MISE EN PLACE D’UN « PARCOURS SALARIÉ-LOGÉ »
Comme l’indique dans un communiqué Jean Castex, PDG du Groupe RATP, l’objectif de ce parcours salarié-logé « est de faciliter la demande de logement pour nos agents afin de diminuer la distance domicile-travail qui est trop souvent une source de difficultés ».
Pour réduire le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail et compte tenu du prix de l'immobilier en région parisienne, l’accord prévoit une augmentation significative de la capacité de la RATP à loger ses salariés puis à prendre en compte leurs besoins au fur et à mesure de leur parcours de vie. « Nous logeons 500 familles par an aujourd’hui, précise le DRH du groupe. Nous avons signé en juillet 2023 une nouvelle convention avec Action Logement, qui permettra de passer à 860 familles d’agents logées. Nous nous engageons à en loger 300 de plus d’ici fin 2024. »
L’analyse de Fabien Renaud, président de la CFE-CGC Groupe RATP
« C’est un axe important eu égard aux tensions sur le marché du travail et au fait que l’Ile-de-France n’est pas forcément une région très attractive en termes de qualité de vie. Il est indispensable, outre l’offre d’emploi à la RATP, de pouvoir proposer des prestations complémentaires comme le logement. Cet accord donne un coup d’accélérateur en la matière. L’entreprise doit investir pour augmenter son parc de logements à disposition, en particulier pour les jeunes embauchés. Nous travaillons en ce sens avec l’organisme paritaire Action Logement et avec le dispositif du 1 % logement. »
CONDITIONS DE TRAVAIL ET SANTÉ AU TRAVAIL
Le texte prévoit par ailleurs de nouvelles dispositions parmi lesquelles :
- Une augmentation du nombre de places en crèche réservées pour les salariés auprès de crèches partenaires.
- Des actions renforçant le droit à la déconnexion.
- La mise à disposition d’espaces de coworking afin de réduire les temps de trajets lors d’un déplacement sur un autre site et pour donner la possibilité aux salariés de télétravailler ailleurs qu’à leur domicile.
- Un plan de réaménagement des locaux dont une dizaine de terminus (par exemple celui de la ligne 2 du métro à Nation) avec l’aide d’Ile-de-France Mobilités, afin d’en renforcer l’ergonomie et le confort.
- Le déploiement de 140 exosquelettes pour équiper des ateliers et assister les salariés occupant les postes les plus difficiles à la maintenance.
- Un module de formation spécifique à la qualité de vie au travail dans le parcours d’accueil et d’intégration des primo-manageurs.
L’analyse de Fabien Renaud, président de la CFE-CGC Groupe RATP
« L’ensemble de ces mesures relatives à la QVCT vont plutôt dans le bon sens et sont nécessaires pour fidéliser les salariés et rendre l’entreprise attractive. Encore une fois, reste désormais à ce que ces dispositions de principe se traduisent dans les faits. »
SALAIRES : LA CFE-CGC NON-SIGNATAIRE DE L’ACCORD
Si la CFE-CGC a paraphé l’accord QVCT, elle a en revanche refusé de signer le récent accord salarial à l’issue des négociations annuelles obligatoires (NAO) pour 2024. « La proposition finale de la direction ne répondait pas à nos attentes eu égard à l’inflation subie et non compensée ces dernières années, justifie Fabien Renaud. Qui plus est, les dispositions de l’accord ne prendront effet qu’en 2025 et favorisent les bas salaires au détriment de l’attractivité des montées en compétences et de la prise de responsabilités des salariés. »
JEUX OLYMPIQUES : UN IMMENSE DÉFI POUR LA RATP ET SES SALARIÉS
À quelques mois des JO de Paris (du 26 juillet au 11 août), la RATP est forcément sur le pied de guerre avec de forts enjeux de dialogue social. « De nombreuses négociations ont été lancées et sont en cours dans l’entreprise par rapport à nos engagements et à nos missions de mobilités vis-à-vis des Franciliens, des délégations, des athlètes et des millions de spectateurs attendus pendant l’événement, indique Fabien Renaud. C’est encore difficile de se projeter précisément tant les contraintes sont complexes en matière de ressources humaines et de sursollicitation attendue des matériels. »
Mathieu Bahuet