La RATP a annoncé, le 24 janvier dernier, un accord salarial prévoyant « une augmentation nette de 1 365 euros sur une année ». Le texte, signé par trois des quatre organisations syndicales représentatives de l’entreprise (CGT, FO, UNSA), ne l’a pas été par la CFE-CGC. Pourquoi ?
Cela fait plusieurs années que les négociations annuelles obligatoires (NAO) débouchent systématiquement sur quelques mesures sociales ne concernant que quelques milliers des 45 000 salariés de l’entreprise. En 2018, nous n’avions pas signé l’accord. Le scénario se répète cette année. Pour la CFE-CGC RATP, premier syndicat de l’encadrement avec 31,70 % de représentativité dans son périmètre catégoriel (agents de maîtrise et cadres), le compte n’y est pas. La proposition finale de la direction mise sur la table - une augmentation de 10 points appliquée au salaire de référence au 1er janvier 2023 puis de 10 autres points au 1er juillet - n’est pas à la hauteur. Cette mesure, certes égalitaire mais non équitable entre les catégories de salariés, représente une augmentation moyenne de 2,6 % pour un agent de maîtrise et de 1,9 % pour un cadre. C’est nettement insuffisant au regard d’une prévision d’inflation à 6 % pour 2023, après une perte de pouvoir d’achat d’environ 4 points déjà subie en 2022.
Après consultation de nos instances consultatives internes, il a été décidé de ne pas signer un tel accord. Cette opposition est l’opportunité d’envoyer un signal fort à la direction et d’afficher nos valeurs en tant que porte-parole de l’encadrement. Une position comprise par notre base d’adhérents et de sympathisants.
« La CFE-CGC RATP déplore un accord salarial non équitable »
Premier syndicat de l’encadrement à la RATP, la CFE-CGC n’a pas signé un accord salarial très insuffisant vis-à-vis des agents de maîtrise et des cadres. Explications avec son président, Fabien Renaud.
Quelles étaient les revendications de la CFE-CGC ?
Nous avons fait valoir que la mesure la plus équitable, pour l’ensemble des salariés, aurait été la revalorisation du point de paie, un dispositif proportionnel au salaire de chaque salarié. Les autres organisations syndicales, qui représentent très majoritairement les personnels opérateurs, ont privilégié l’attribution de points supplémentaires. Autre point de crispation nous concernant : dans le cadre de la rémunération des encadrants, il y a une partie fixe et une partie de progression automatique, par échelon. Or, cette dernière a été supprimée l’an dernier pour les cadres, créant un manque à gagner.
Nous attendons un geste significatif à la hauteur de l’engagement de l’encadrement dans la réussite de la transformation de l’entreprise »
Quelles sont les prochaines échéances sur le terrain salarial ?
La CFE-CGC RATP reste très mobilisée sur la négociation annuelle en cours pour l’enveloppe allouée à la politique de rémunération de l’encadrement (PRE), relative à l’avancement. Alors que les propositions de la direction, dans le cadre des NAO, ne profitent pas pleinement aux personnels de l’encadrement, et principalement aux cadres, nous attendons, à l’occasion de la PRE, un geste significatif de l’employeur, à la hauteur de leur engagement quotidien dans la réussite de la transformation de l’entreprise.
Plus largement, comment se passe le dialogue social depuis la nomination, en novembre 2022, de Jean Castex à la présidence de la RATP ?
En termes de discours, de posture et de présence sur le terrain, c’est le jour et la nuit avec l’ancienne présidente, Catherine Guillouard. L’ancien Premier ministre fait preuve d’humanité et reconnaît que tout n’est pas bien fagoté au sein de l’entreprise, en particulier dans la perspective de l’ouverture à la concurrence à partir du 1er janvier 2025. Il tient jusqu’ici un discours de vérité qui parle aux salariés, invitant à travailler étroitement avec toutes les parties prenantes, à savoir Île-de-France Mobilités (ndlr : l'autorité organisatrice de la mobilité pour la région) et l’État. Dans le cadre du conseil d’administration, où je siège pour la CFE-CGC, les échanges sont directs. J’ai eu l’occasion d’y rappeler nos priorités, en particulier la politique de rémunération et de reconnaissance de l’encadrement.
En parallèle, la CFE-CGC RATP a mis en place un programme de développement syndical pour s’adapter aux enjeux de la transformation majeure que connaît l’entreprise. En 2025, 30 % des effectifs de la RATP vont en effet sortir de l’Établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Jusqu’en juillet 2022, toutes les filiales du Groupe RATP étaient des activités supplémentaires, en dehors de l’EPIC. Depuis cette date, des filiales sont mises en place, issues de l’activité au sein de l’EPIC. Il s’agit d’investir ces filiales pour être prêts quand s’y tiendront des élections professionnelles.
En ordre de marche face au projet de réforme des retraites et aux arguments mensongers du gouvernement »
Dans quelle mesure la CFE-CGC RATP et ses adhérents sont-ils mobilisés contre le projet de réforme des retraites ?
En parfait accord avec la ligne confédérale, nous nous sommes mis en ordre de marche pour la manifestation nationale du 19 janvier dernier. Un peu dans l’urgence, nous avons pu déposer un préavis de grève illimitée et mobiliser les salariés. Dans l’entreprise, le bilan de la mobilisation est plutôt positif, à la hauteur du mécontentement national qui s’est exprimé dans les cortèges. D’ores et déjà, nous mobilisons pour le prochain mouvement du 31 janvier. Les arguments exposés par le gouvernement sont basés sur un mensonge et le projet de réforme proposé ne vise qu’à capter et à spolier l’argent issu du travail des salariés.
Propos recueillis par Mathieu Bahuet