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« La CFE-CGC œuvre pour de réelles évolutions de carrière des agents »
A l’approche des élections professionnelles dans la fonction publique (décembre 2022), Simon-Pierre Policciardi, secrétaire national confédéral du pôle public, analyse les enjeux et la stratégie de la CFE-CGC.
Après plusieurs années de gel, le point d’indice a été augmenté, au 1er juillet dernier, de 3,5 % pour tous les agents. Qu’en pensez-vous ?
Deux remarques. Une mathématique : pour rattraper la baisse de pouvoir d’achat des agents, il manque, au bas mot, une dizaine à ce pourcentage. Autrement dit : 3,5 %, j’appelle cela une aumône ! Ma deuxième remarque tient à ce que tout le monde connaît dans le syndicalisme, que l’on nomme négociation annuelle obligatoire (NAO). Alors que l’État est garant, à travers ses institutions ad hoc, de la bonne application de cette réglementation en entreprise, les pouvoirs publics, cette fois dans le rôle d’employeur, s’autorisent l’absence de NAO pendant des années et des années ! Quelle insulte, à la fois aux agents, aux partenaires sociaux et au monde de l’entreprise.
Quelle est la dynamique de la CFE-CGC en matière de représentativité dans le secteur public ?
Les dernières élections professionnelles de 2018 montrent une progression de 16 % des syndicats affiliés à la CFE-CGC. On assiste bien là à une progression équivalente à ce qui se passe pour notre Confédération dans le secteur privé. Le distinguo doit être fait sur l’historique. En effet, la CFE-CGC, de façon relative, a contrario de la concurrence syndicale, est implantée depuis peu dans la fonction publique. Les habitudes et les mœurs syndicales diffèrent. Tout ça mérite de laisser du temps au temps. Les agents, les électeurs, sauront faire la différence entre les partenaires implantés depuis longtemps et parfois in primo dans le public, et nous, la CFE-CGC, avec un concept d’analyses et de propositions radicalement différents, en phase avec le monde d’aujourd’hui.
Quelle importance revêtent les élections professionnelles de décembre 2022 ?
Ces élections ne concernent pas seulement le Pôle public ni quelques syndicats en particulier. C’est une cause commune à toute la Confédération car le résultat pourrait impacter la représentativité globale de toutes nos structures. Il est grand temps que la capacité éclairée des membres de la CFE-CGC, comme c’est le cas dans le privé, s’impose fortement dans le secteur public.
La CFE-CGC a en effet la capacité de faire de la fonction publique un employeur attentionné, socialement comme financièrement, qui offre un réel parcours professionnel à ses agents et qui (re)motive le personnel pour rendre un service de qualité aux citoyens. Nous devons donc améliorer notre maillage avec nos syndicats affiliés. Une fois élus, comme déjà dit, nous proposons une approche nouvelle avec un constat, une analyse puis des propositions. Cette méthode issue du secteur privé peut tout à fait être entendue par les agents, d’autant que nous voulons œuvrer en faveur de réelles évolutions de carrière. C’est notre porte d’entrée.
Quel dispositif votre secteur a-t-il mis en place pour aider les syndicats à faire campagne et à se développer ?
Il s’agit pour nous de donner l’outil ad hoc, qui permet d’ouvrir la campagne en fonction de la nouvelle réglementation des instances sociales de la fonction publique, j’y reviendrai. En parallèle à ce dispositif, le chantier s’est poursuivi par l’équipement de nos militants de terrain avec un outil de qualité. Nous avons tenu compte des délais, de la qualité des structures, des implantations, des viviers de voix et des possibilités des militants. Après cet inventaire, nous avons construit une coordination confédérale autour de l’équipe du secteur Pôle Public, avec l’assistance technique des services confédéraux, des syndicats concernés, de la Fédération support et des militants de tous les horizons CFE-CGC. Cette coordination confédérale ne retire rien à l’investissement stratégique de nos syndicats et de notre Fédération des services publics. Elle vient en complément de l’action électorale des structures.
Comment analysez-vous la baisse régulière du taux de participation lors des derniers scrutins de 2014 (52,8 %) et 2018 (49,9 %) ?
Là aussi, je peux répondre en deux parties, bien qu’il faudrait plus de temps pour détailler la situation de façon complète. D’une part, la situation tient à l’histoire syndicale dans la fonction publique. Les organisations syndicales implantées depuis longtemps et, comme je l’ai déjà dit, parfois depuis le début, montrent lors des derniers scrutins l’ampleur de leur impuissance, prisonnières d’un système syndical qui, s’il leur a donné l’avantage à une certaine période, les confinent maintenant dans un immobilisme parfois, souvent, mortifère. Ce constat, que l’agent est parfaitement à même de voir, repousse l’électeur de l’urne.
L’autre raison, plus technique, tient à la nouveauté du scrutin électronique qui se généralise, mais aussi à la complexité même de l’enchevêtrement des administrations composées en établissements et/ou en services et/ou en sous-services et/ou encore en directions et sous-directions… Un nombre incalculable, sans doute même par l’autorité publique elle-même. Au point qu’il n’est pas rare qu’un agent ne s’y retrouve pas ou difficilement, et que s’envole ainsi son éventuelle envie de voter. Enfin, le courrier postal, posé sur une table chez soi, oublié dans les priorités de la vie courante, ou le message numérique administratif immergé dans le nombre excessif de courriels professionnels, n’arrangent rien au taux de participation.
Quel regard portez-vous sur l’action gouvernementale vis-àvis de la fonction publique ces dernières années ?
Nous ne pouvons que constater la désinvolture et la mauvaise foi gouvernementale, partagées par tous les ministères successifs, par ceux-là même qui utilisent des cabinets d’audit aux factures salées pour copier-coller le schéma du secteur privé. Lequel schéma n’a pourtant montré que deux choses : la hausse du chiffre d’affaires de ces cabinets et le désastre social de ce choix global ! L’erreur ne fait pas toujours exemple. Cela se traduit par quelques signes révélateurs comme l’appellation de la tutelle : depuis quelques années, le ministère de la Fonction publique est passé sous la coupe de celui des Comptes publics. Autrement dit et, c’est à la limite de l’injure, les agents de la fonction publique sont devenus un coût et rien d’autre !
Comment la CFE-CGC accompagne-t-elle ses militants du Pôle public, en particulier s’agissant des nouvelles instances de dialogue social ?
Le soutien confédéral aux militants sur site est une préoccupation prépondérante à la CFE-CGC. Elle se fait soit en direct quand la situation l’exige ou que cela est demandé expressément, ou le plus couramment par l’intermédiaire des Fédérations ou des syndicats concernés. Pour le secteur Pôle public, il convenait d’offrir à nos militants la même prestation, pour les nouvelles instances de dialogue social, que ce que la Confédération a offert pour le secteur privé quand le comité social et économique (CSE) en entreprise a été mis en place.
Outiller nos militants sur les nouvelles instances de dialogue social dans la fonction publique. »
Depuis plusieurs années, avec l’aide des services de la CFE-CGC et de cabinets extérieurs, le secteur a construit, sujet par sujet, méticuleusement, des fiches pour les nouvelles instances de dialogue social (CSA pour l’État, CST pour la territoriale et CSE pour l’hospitalière). Elles permettent un décryptage, une analyse et, en quelque sorte, un mode d’emploi pour le militant intéressé au sujet. Après ce long travail qu’il a fallu reprendre après les dernières modifications réglementaires du printemps dernier, les fiches, transmises à toutes les Fédérations, sont accessibles aux collègues concernés.
Par ailleurs, le Centre de formation syndicale (CFS), en partenariat avec la Fédération, est en train de décliner ces fiches en formations en présentiel à destination des militants pour une appropriation plus complète de la matière. Enfin, le secteur Pôle Public propose aux militants, depuis près de deux ans, une ligne numérique de soutien accessible uniquement par écrit et par courriel pour obtenir, dans certains cas de la vie professionnelle, une réponse à une question juridique. C’est un besoin incontournable pour le service public, compte tenu de la foison de textes du périmètre.
Propos recueillis par Mathieu Bahuet
A lire aussi : le dossier fonction publique dans le magazine CFE-CGC n°16 (septembre 2022)