Après l’annonce de la fermeture des usines de Vannes (Morbihan) et Cholet (Maine-et-Loire), Valérie Dossin, délégué syndicale centrale adjointe de Michelin France, fait le point.
Quel est l’état d’esprit de la CFE-CGC Michelin en ce moment ?
Tristesse et déception sur la forme, incompréhension sur le fond.
Sur le fond, notre colère vient de ce que ces fermetures de Vannes et de Cholet, qui menacent directement 1254 salariés, résultent de la stratégie de course à la rentabilité de l’entreprise et non du marché ou de la conjoncture, comme elle le prétend. Lorsque la direction de Michelin nous dit qu’elles sont inéluctables, nous répondons que c’est inexact et nous le démontrons sur notre site internet. On nous parle de l’énergie trop chère en France. Or Michelin produit en Pologne où elle est deux fois plus chère et sans être décarbonée qui plus est !
DES INQUIÉTUDES TRAITÉES PAR LE MÉPRIS
Sur la forme, la façon dont l’entreprise a annoncé ces fermetures nous rend amers. Depuis des mois, nous demandons à être associés. Il y a une intersyndicale (CFE-CGC, CFDT, FO, Sud), nous avons lancé un droit d’alerte, fait effectuer un audit… A chaque fois, la direction refusait d’échanger sur nos inquiétudes et alertes, les traitait par le mépris. Finalement, un dimanche soir, on apprend par les médias que deux usines vont fermer… Si tout était déjà écrit, pourquoi ne nous a-t-on pas associés ? Cela aurait été plus efficace et moins rude pour les salariés.
Quelles sont les prochaines échéances ?
Un comité social et économique central extraordinaire doit se tenir demain (mercredi 13 novembre, ndr). Nous espérons que l’entreprise va accepter de renouer le dialogue et nous donner des éléments complets sur la façon dont les salariés seraient accompagnés. Notre Intersyndicale a gelé toutes les négociations depuis octobre. Nous ne venons plus à la table des discussions sur le télétravail par exemple. J’espère que Michelin acceptera de renouer le dialogue de façon qu’on puisse reprendre le travail sur tout le reste.
SE BATTRE POUR ÉVITER LES FERMETURES
Quel rôle va jouer la CFE-CGC dans les jours qui viennent ?
Avec José Tarantini, le DSC de Michelin France, nous allons commencer à négocier l’accord de méthode le 21 novembre. Ce qui ne veut pas dire que nous entérinons les fermetures : nous allons nous battre pour les éviter, mais nous allons le faire à condition que cela ne nuise pas à l’accompagnement des salariés. Nous allons nous rendre à Cholet et à Vannes pour les rencontrer, les écouter et être totalement en ligne avec eux.
Par ailleurs, nous allons continuer à dialoguer et à réfléchir sur la manière d’éviter que d’autres sites ferment. Michelin nous a conviés à participer à un grand plan « Michelin Industrie France 2030 ». Nous voulons en faire une plateforme du maintien de l’industrie Michelin en France. Nous contestons les fermetures, mais nous voulons aussi être force de proposition de manière que ce plan soit en faveur de l’entreprise et des salariés. C’est l’axe clé pour nous.
FRONT UNI CONTRE LES PLANS SOCIAUX
Comment se situe votre combat dans le contexte économique en France ?
Nous étions, jeudi dernier, à une réunion de la fédération CFE-CGC Chimie au cours de laquelle nous avons ressenti un grand élan de solidarité. Les autres militants nous ont dit qu’ils seraient là pour nous soutenir dans tous les domaines, logistique, communication, recherche de débouchés pour les salariés. Nombre d’entre eux sont concernés par exactement la même chose que nous : des fermetures et des suppressions d’emplois effectuées au nom de la rentabilité avec un mépris des salariés et des instances de représentation du personnel. Si on arrivait à ne plus lutter en tant que Michelin seul mais avec l’appui d’autres entreprises, ce serait très puissant. Il y a quelque chose qui est en train de germer au nom de la solidarité.
Propos recueillis par Gilles Lockhart