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Publié le 15 - 01 - 2025

    Discrimination envers les seniors : le sondage choc

    Le 17e baromètre du Défenseur des droits porte sur les discriminations dans l’emploi envers les seniors. Ses résultats, alarmants, confortent les mobilisations de la CFE-CGC sur ce dossier.

    On compte en France 30,6 millions de personnes en âge de travailler, selon l’Insee, dont plus d’un quart a plus de 50 ans. Selon l’Insee toujours, le taux d’activité des 55 ans ou plus a presque doublé entre 1998 et 2021, pour se stabiliser désormais autour de 25 %.

    Si le taux d’emploi des seniors est en hausse, ceux-ci restent confrontés à d’importantes difficultés d’accès à l’emploi ou de maintien dans l’emploi. Régulièrement saisi par des personnes de 50 ans et plus pour des discriminations liées à l’âge (refus d’embauche, incitation à partir à la retraite de façon prématurée, etc.), le Défenseur des droits, associé à l’Organisation internationale du travail (OIT), a décidé de consacrer son 17e baromètre des discriminations dans l’emploi à la situation des seniors. 

    Méthodologie de l’enquête 
    L’enquête a été réalisée par le CSA en avril 2024, par Internet auprès d’un échantillon de 1005 individus âgés de 18 à 65 ans représentatif de la population active et d’un sur-échantillon de 1279 individus actifs de 45 à 65 ans. Précision terminologique : il n’existe pas de définition légale des seniors, ce terme n’ayant plus sa place dans le Code du travail, le législateur lui préférant l’expression « salariés âgés ». Mais chez les acteurs du recrutement, l’âge « senior » s’établit souvent à 50 ans, critère retenu par le présent baromètre.

    Caractéristiques de l’emploi senior
    Les seniors en emploi sont majoritairement des cadres (22 %) ou exercent une profession intermédiaire (21,6 %). La proportion de seniors en emploi s’accroît avec le niveau de diplôme : en 2017, elle était de 70 % chez les Bac+2 ou plus contre moins de 40 % pour les non diplômés ou titulaires du certificat d’études primaires.

    En France, en 2023, le taux d’emploi des femmes de 55-64 ans (57,2 %) est proche de la moyenne de l’Union européenne (58,1 %), alors que celui des hommes est inférieur de plus de 10 points. Par ailleurs, à 5,7 %, le taux de chômage des seniors reste plus bas que celui de l’ensemble des actifs. 

    Grandes lignes de la discrimination des seniors
    Une fois le constat posé d’une situation des seniors globalement mieux payés, plus souvent en CDI et moins soumis au sous-emploi que leurs cadets, le baromètre égrène un certain nombre de chiffres marquants de la discrimination liée à l’âge et en examine les conséquences.

    Près d’un quart des seniors déclarent avoir vécu des discriminations

    • Un sur deux a connu des relations de travail dévalorisantes au cours des 5 dernières années.
       
    • Les seniors perçus comme non-blancs déclarent davantage que les autres avoir vécu des discriminations dans l’emploi (43 % contre 22 %), de même que ceux déclarant une mauvaise santé (32 % contre 17 %) ou une situation économique précaire (30 % contre 15 %). 
       
    • Un tiers des seniors se disent inquiets quant à leur avenir professionnel et un sur cinq déclare travailler avec la peur de perdre son emploi.
       
    • 66 % des seniors pensent qu'ils pourraient être discriminés en raison de leur âge à l’avenir.

    Incidences des discriminations sur la santé et la motivation
    À la suite des discriminations subies, 22 % des victimes ont démissionné ou négocié leur départ et 16 % ont été licenciées ou n’ont pas vu leur contrat renouvelé. Près d’une sur cinq a vu ses conditions de travail dégradées, a pris des mesures de protection ou a décidé de se réorienter professionnellement. 71 % des victimes indiquent que leur santé mentale s’est dégradée (tristesse, fatigue, dépression). 

    Faible recours aux droits
    Un tiers des victimes de discrimination, tous âges confondus, n’ont entrepris aucune démarche pour dénoncer les faits. L’absence de signalement s’explique par le fait que les victimes pensaient que cela n’aurait rien changé (43 %), ne savaient pas quelle démarche entreprendre (36 %), craignaient les représailles (26 %), n’avaient pas conscience qu’il s’agissait d’une discrimination (25 %) ou n’avaient pas de preuves (20 %). 

    Difficultés de retour à l’emploi 
    Parmi les seniors au chômage, 79 % déclarent être en recherche d’emploi depuis plus d’un an et 45 % depuis plus de 3 ans. À titre de comparaison, la durée moyenne d’inscription à France Travail constatée fin 2023 était de 11 mois. Un quart des seniors au chômage indiquent qu’on leur a déjà dit ou fait comprendre qu’ils étaient trop âgés pour le poste lors d’un entretien d’embauche.

    Temps partiel pas toujours choisi
    Les actifs âgés de 50 à 65 ans sont significativement plus à temps partiel que les actifs âgés de 18 à 49 ans (16 % contre 11 %). 27 % des seniors en temps partiel le justifient pour des raisons de santé, 34 % car ils n’avaient pas la possibilité de travailler davantage.

    Les seniors se rebiffent
    Parmi les seniors actifs, ceux des catégories socioprofessionnelles élevées adhèrent en partie à l’idée que « les seniors coûtent cher aux entreprises » (31 % contre 24 % pour l’ensemble de la population active). Mais ils s’élèvent contre les stéréotypes disant que « les seniors ont une santé fragile » (62 % en désaccord) ou qu’ils « sont dépassés par les nouvelles technologies » (65 % en désaccord). 

    Gilles Lockhart