Revenu de base : pour la CFE-CGC, il est urgent d’attendre
Tantôt présenté comme un outil de lutte contre la pauvreté ou de simplification du système de protection sociale, le revenu de base s’est invité dans le débat public et au Sénat.
Si le sujet a le mérite d’interpeller sur la place du travail dans notre société, la CFE-CGC préconise une analyse préalable approfondie de toutes les conséquences d’un tel dispositif.
- Le revenu de base, c’est quoi ?
Plébiscité par les uns (altermondialistes comme ultra-libéraux !), abhorré par d’autres, le revenu de base (également appelé « revenu universel » ou « revenu d’existence »), serpent de mer en France et dans de nombreux pays depuis des décennies, refait surface dans l’Hexagone.
Parmi les nombreuses définitions entourant le concept, citons celle du Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB), association créée en 2013, pour qui le revenu de base "est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement".
En clair, tout le monde (enfants, étudiants, salariés, autoentrepreneurs, chômeurs et retraités) a le droit à un revenu de base, sans condition ni contrepartie.
- Quelques (rares) expérimentations à l’étranger
Après diverses tentatives menées aux quatre coins du monde (Alaska, Canada, Inde, Singapour…), la Finlande s’apprête à devenir le premier pays européen à tester le versement d’un revenu de base - fixé à 560 euros mensuels - à l’ensemble des citoyens. Le dispositif va aussi être testé aux Pays-Bas mais seulement dans un certain nombre de communes.
- En France, le Sénat s’empare du sujet
A l’initiative de 27 sénateurs de tous partis politiques et après plusieurs mois de travaux et d’auditions (dont celle de la CFE-CGC en septembre), un rapport intitulé « Le revenu de base en France : de l’utopie à l’expérimentation » a été rendu public le 19 octobre. Celui-ci préconise d’expérimenter rapidement, "dans des territoires volontaires", différentes modalités d’une mise en place d’un revenu de base.
- La position de la CFE-CGC
La CFE-CGC n’est pas fermée sur le sujet - y compris quant à une éventuelle expérimentation bien encadrée du dispositif - mais il ne faut surtout pas se précipiter ! "Le revenu universel fait partie d’une famille de solutions, parmi d’autres, explique Gérard Mardiné, secrétaire national. La CFE-CGC souhaite que les analyses soient menées en profondeur afin de mesurer tous les impacts économiques et sociétaux qu’occasionnerait la mise en place d’un tel dispositif."
De nombreuses questions se posent en effet : quel serait le montant de ce revenu ? Supprimerait-on le Smic ? Quid du financement ? Se substituerait-il à d’autres prestations/aides existantes (minimas sociaux, allocations familiales, aides au logement…) et si oui, lesquelles ? "Pour la CFE-CGC, la retraite, l’assurance chômage et la maladie doivent par exemple être exclus d’un tel dispositif", indique Gérard Mardiné. Le revenu universel ne devrait remplacer que les minima sociaux afin de garantir l’efficacité de ces aides sans compromettre notre modèle de protection sociale."
Alors que l’automatisation, l’ubérisation et la révolution numérique bouleversent l’organisation du travail, la CFE-CGC rappelle par ailleurs que le salariat va et doit rester le modèle dominant, quand d’aucuns présentent parfois le revenu de base comme un moyen de sortir du modèle du salariat…
- Le regard de François Hommeril, président confédéral
"D’une certaine façon, le revenu universel existe déjà dans les faits avec divers mécanismes et aides pour accompagner les millions de personnes en âge de travailler et qui ne travaillent pas en raison du chômage, de la maladie, des accidents de la vie, etc. La CFE-CGC n’a pas de position arrêtée : il convient d’abord de prendre le temps d’analyser et de construire du fond avant, le cas échéant, de traiter la question à moyen terme."
Mathieu Bahuet