Après un appel à projet de l’Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT), la candidature CFE-CGC a été retenue sur le thème « Travail hybride : faire évoluer le management et l’organisation ». En quoi va consister ce projet ?
En juin dernier, nous avons été interpellés par cet appel à projet faisant écho aux travaux engagés par la CFE-CGC sur l’évolution du rôle des managers à la suite du grand tournant pris ces dernières années par l’organisation du travail. Cette démarche a été une évidence au regard de l’ADN et de la légitimité de la CFE-CGC, syndicat de l’encadrement, et de l’atout que constitue notre réseau de militants au sein des entreprises.
Les trois phases interdépendantes de ce projet visent à construire, sur la base d’un diagnostic documentaire et de retour d’enquêtes auprès de nos adhérents, des outils interactifs d’autodiagnostic à destination des managers et des entreprises. Objectif : les accompagner à mieux appréhender cette révolution dans le monde du travail en s’appuyant sur les militants pour promouvoir l’essaimage de ces outils.
Dans quelle mesure la crise sanitaire a-t-elle accéléré la mutation des organisations du travail du point de vue managérial ?
Le confinement a constitué une période inédite : il a fallu se réinventer afin de poursuivre l’activité. Les dernières barrières qui ne permettaient pas la mise en place du travail à distance sont tombées. Pour certains, le télétravail, qui n’était pas possible, l’est devenu. Le train était toutefois déjà en route sur certains aspects : le confinement n’a contribué qu’à leur accélération, notamment l’utilisation des outils numériques et robotiques. En matière de suivi, on assiste à la prolifération de dispositifs tels que le contrôle devant écran, le suivi géographique, le « flicage ». Autre réalité : la nouvelle culture professionnelle constituée par les réseaux sociaux, la flexibilité des horaires et le nomadisme. Autant d’éléments structurants auxquels le manager doit faire face et qui nécessitent un accompagnement adapté.
Face au risque de fragilisation des collectifs de travail, comment s’adapter à ces évolutions ?
Les fonctions de manager ont évolué. La notion de collectif aussi. Aujourd’hui, le manager doit s’adapter aux individus alors qu’avant, il fallait s’adapter à l’équipe. Il doit aussi s’organiser autour des tâches plutôt que par grands ensembles. Cela change tout. C’est générateur de stress et de risques pour la santé. Dans le même temps, le manager a des responsabilités accrues de par son rôle attendu de garant de la non-discrimination, des différents volets de la RSE, etc. Et ce parfois avec des injonctions contradictoires, une perte de repères et un environnement économique engendrant une dilution de son rôle premier d’animation humaine au profit du reporting et de la gestion administrative et financière. Cerise sur le gâteau : il doit piloter une équipe de façon hybride avec des collaborateurs en présentiel et en distanciel.
Ce projet avec l’ANACT doit donc permettre de bâtir et de mettre à disposition des managers des outils pour les accompagner et éviter les écueils.
Propos recueillis par Mathieu Bahuet
