Les premiers accords des négociations annuelles obligatoires (NAO) dans le secteur bancaire viennent d’être signés. Notamment chez BNP Paribas, après trois séances de discussion avec la direction. Rémi Gandon, délégué syndical national CFE-CGC dans l’entreprise et président de la fédération CFE-CGC métiers de la finance et de la banque, relève qu’elles se sont déroulées dans un climat compliqué. Il souligne que d’autres chantiers retiennent l’attention de la CFE-CGC qui fera preuve d’opiniâtreté pour les voir aboutir. Entretien.
« L’accord salarial chez BNP répond en partie à nos revendications »
Délégué syndical national CFE-CGC chez BNP Paribas et président de la Fédération CFE-CGC des métiers de la Finance et de la Banque, Rémi Gandon décrypte l’accord salarial signé dans l’entreprise et les NAO engagées dans le secteur bancaire.
Comment qualifieriez-vous les négociations annuelles obligatoires cette année au sein de BNP Paribas ?
Je les estime compliquées. Les représentants de la direction nous ont opposé une série d’arguments factuels. Le retour d’une inflation standard, d’abord, inférieure à 2 %. Malgré l’excellente santé de l’entreprise au niveau mondial, le deuxième argument de la direction était que sur notre périmètre franco-français, les résultats sont en baisse, avec des difficultés au sein de notre réseau d’agences. Dès lors, la problématique a consisté à faire comprendre à l’entreprise qu’au-delà de la dimension comptable et économique, il convenait de prendre en considération la dimension sociale. Les NAO représentent un rendez-vous important pour les salariés, qui s’investissent beaucoup dans leur travail. On a insisté sur un nécessaire équilibre à trouver entre contraintes économiques et engagements sociaux.
Les NAO représentent un rendez-vous important pour les salariés, qui s’investissent beaucoup dans leur travail »
La direction a signifié qu’en cas de refus de ses propositions, les primes seraient moindres. Y voyez-vous un chantage ?
Plutôt une prime à la signature. C'est pourquoi nous avons réalisé un sondage auprès de nos 7000 adhérents. Ils ont répondu que les propositions leur semblaient insuffisantes mais 90 % se sont montrés favorables à notre signature, arguant que 1 200 euros de prime leur semblaient plus souhaitables que 800 euros.
Que prévoit l’accord plus précisément ?
Une prime de partage de la valeur comprise entre 900 et 1 200 euros selon que le salaire annuel est supérieur ou inférieur à 60 000 euros. Une enveloppe de 1,8 % de la masse salariale dédiée aux augmentations individuelles. Et une hausse de 0,3 % des cotisations employeur sur le plan d’épargne retraite d’entreprise obligatoire jusqu’à 4 pass, les plafonds de la Sécurité sociale. Une nouvelle tranche du Pero est aussi créée entre 4 et 8 pass. Enfin, une enveloppe de 10 millions d’euros, pour deux ans (2025 et 2026), doit intervenir pour favoriser l’égalité professionnelle.
Donc pas d’augmentations collectives…
Cet accord répond seulement partiellement à nos revendications. Mais ce n’est pas une fin en soi. Nous poursuivons nos combats syndicaux sur les autres fronts comme l’intéressement ou la participation. Et à nouveau, notre défi est de faire comprendre à la direction qu’elle ne doit pas seulement se focaliser sur le périmètre national pour les déterminer.
Nous demandons un accord spécifique sur l’aidance »
Au-delà des négociations salariales, quel est le climat social au sein de l’entreprise ?
Difficile. Nous demandons par exemple un accord spécifique sur l’aidance. L’entreprise rétorque que des mesures existent déjà dans d’autres textes, comme celui sur la diversité. Mais nous souhaitons que le sujet des aidants soit visualisable dans un accord en tant que tel. Ce qui n’implique pas que des mesures coûteuses ! Juste parfois une souplesse dans l’organisation du travail. Il faut déployer beaucoup d’opiniâtreté quand on exerce un mandat syndical. Donc nous ne lâchons pas. Et parfois nous aboutissons, comme cet automne avec notre accord sur la qualité de vie et les conditions de travail, qui prévoit notamment des indicateurs sur la charge de travail. Nous avons beaucoup attendu pour que cela soit mis en place. Reste, une fois l’accord signé, à bien le faire connaître des salariés.
Au-delà de votre entreprise, que savez-vous des NAO pour 2025 dans le secteur bancaire en général ?
Il me semble qu’une différentiation va se faire entre les groupes mutualistes et les autres. Je ne serais pas surpris que les premiers s’accordent sur des augmentations générales des salaires plutôt que sur des primes. Même si ici ou là, une caisse régionale pourra en octroyer aussi. Les groupes non mutualistes pourraient inversement se diriger davantage vers des primes. Reste qu’il est souvent bien difficile de se livrer à des comparaisons, parce qu’une proposition mieux-disante peut parfois cacher une autre réalité sur la structuration des politiques des rémunérations fixes et/ou variables en vigueur dans l’entreprise.
Quelles sont les préférences de la CFE-CGC ? Augmentations ou primes ?
Fromage et dessert ! Sur le long terme, les augmentations de salaires permettent d’atteindre quelque chose de significatif année après année. L’avantage des primes, c’est qu’elles donnent immédiatement une bouffée d’air aux salariés, un gain en pouvoir d’achat, et une reconnaissance plus visible. Les deux mesures sont donc complémentaires.
Propos recueillis par Sophie Massieu