Déjà soumis à rude épreuve depuis le début de la pandémie de Covid-19 qui a touché de plein fouet le tourisme et les spécialistes du secteur (-90 % de chiffre d’affaires à date en 2020 pour TUI France et ses trois marques emblématiques : Marmara, Nouvelles Frontières et Lookéa), les 900 salariés du premier tour-opérateur français ont pris un coup de marteau derrière la tête le 24 juin dernier. Date à laquelle ils ont appris, par visioconférence, le projet de plan social impulsé par la direction de TUI France - filiale du géant allemand TUI Group - visant la suppression de 583 postes et des modifications de contrats de travail pour une vingtaine de salariés, soit plus de deux tiers des effectifs de l’entreprise concernés.
Chez TUI France, un plan social qui passe mal
Annoncé brutalement en juin aux 900 salariés du premier tour-opérateur français, le plan prévoit la suppression de près de 600 postes. Dans un climat social très lourd, la CFE-CGC et l’intersyndicale restent mobilisées.
Le choc a été d’une extrême violence pour l’ensemble des équipes qui se sont démenées pendant la crise sanitaire, notamment afin de rapatrier tous nos clients », explique Céline Lerat, élue CFE-CGC au Comité social et économique (CSE) et membre de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT).
Habitués aux restructurations (pas moins de cinq plans ces dix dernières années avec un solde négatif de 1 700 emplois supprimés), les salariés de TUI France, placés en chômage partiel jusqu’à la fin de l’année, sont cette fois au bout du rouleau. « Je n’ai jamais observé autant de détresse chez mes collègues, y compris chez les cadres et les managers, constate Céline Lerat. Les risques psychosociaux (RPS), face auxquels la direction n’a jamais engagé de réelles actions de prévention par le passé malgré les alertes des instances de représentation du personnel, sont aujourd’hui très élevés. »
« UN PLAN PUREMENT ÉCONOMIQUE ET DÉNUÉ DE LA MOINDRE STRATÉGIE D’ENTREPRISE »
Si la direction met en avant la crise sanitaire pour justifier son plan social mené à un rythme effréné et qui doit s’appliquer d’ici fin décembre, les organisations syndicales soulignent l’hypocrisie de l’employeur et le manque total de concertation. « Ce plan était déjà dans les cartons depuis un moment pour réduire la masse salariale, déplore Céline Lerat. La direction souhaitait par ailleurs adosser TUI France à un partenaire financier pour céder son réseau de 65 agences intégrées (300 salariés) mais la pandémie a rompu toutes les discussions. Ce plan est donc purement économique et dénué de la moindre stratégie d’entreprise, sans tenir compte des besoins et des ressources pour faire face à la charge de travail, et ce alors que TUI France a reçu pas moins de 10 millions d’euros d’aides de l’État par le biais du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). »
Dans un climat social très lourd et alors que la direction a refusé la proposition de la CFE-CGC de mettre en place un médiateur sur les conditions de départs, l’intersyndicale (CFE-CGC, CFDT, CGT et FO), déjà reçue à Bercy, à deux reprises au ministère du Travail et par la Direccte (l’instance d’homologation des PSE), reste plus que jamais mobilisée. « Nous souhaitons obtenir des congés de reclassement dignes de ce nom pour les moins de 50 ans (12 mois au lieu des 6 prévus dans le plan) et pour les plus de 50 ans (18 mois au lieu de 9), ainsi que des indemnités supra-légales (1 mois par année d’ancienneté), détaille Céline Lerat. Nous avons par ailleurs obtenu une hausse du budget de formation et des budgets dédiés à l’auto-entreprise, à la création ou à la reprise d’entreprise. »
En intersyndicale, les élus du CSE auront de nouveau l’occasion d’échanger avec la Direccte, « particulièrement à l’écoute actuellement », à l’occasion d’une visioconférence prévue le 15 octobre.
Mathieu Bahuet