Quels sont vos mandats syndicaux respectifs et qu’en est-il de vos activités professionnelles chez Bayer en France ?
Yannick Lespitaou : Depuis 2020, je suis délégué syndical pour l’entité Bayer Seeds SAS et élu au comité social et économique (CSE). Je faisais partie de l’entreprise Monsanto (rachetée en 2019 par Bayer) au sein de laquelle j’étais élu au comité d’entreprise (CE). Au niveau professionnel, je suis coordinateur planning calibrage sur le site de Peyrehorade dans les Landes. À côté de ça, je dirige une petite exploitation agricole.
Chez Bayer, les équipes CFE-CGC au top !
Majoritaire au sein de la filiale française du groupe chimique allemand avec 50,19 % de représentativité aux élections professionnelles, la CFE-CGC mène un travail de fond reconnu par les salariés. Témoignages avec 5 militants.
Marc Legrand : Je travaille au sein de Bayer SAS, une des trois entités du groupe avec notamment un centre de recherche au siège à Lyon, un centre R&D dans la technopole de Sophia Antipolis en PACA, et 2 usines à Villefranche (Rhône) et à Marle (Aisne). Je suis délégué syndical central CFE-CGC de Bayer Crop Science (produits pour l’agriculture et la protection des cultures) et je siège au CSE ainsi qu’au CSEC. Je travaille dans le département business development licensing pour la vente aux sociétés tierces à qui Bayer vend et licence certaines activités (molécules, semences…).
Anne Bonhenry : Je travaille chez Bayer Pharma depuis 1991 et j’occupe actuellement le poste de conseillère scientifique en oncologie au département des affaires médicales. Adhérente CFE-CGC depuis plusieurs années, j’ai siégé au CHSCT et je suis aujourd’hui déléguée syndicale et élue CSE sur le site de Loos (Nord), siège de Bayer HealthCare SAS. Je m’apprête à devenir déléguée syndicale centrale, succédant à mon collègue Pierre Duval.
Pierre Duval : Après une carrière de délégué médical, je suis en phase de cessation concertée d’activité. Au plan syndical, j’ai été pendant sept années délégué syndical central CFE-CGC pour Bayer Pharma et Bayer HealthCare. Je suis très fier de voir Anne Bonhenry prendre la suite des opérations. Elle a effectué, avec les équipes, un travail remarquable pour mener campagne lors des récentes élections professionnelles.
Nelly Enginger : Je suis la coordinatrice CFE-CGC au niveau du groupe Bayer en France. Mon rôle est de mettre de l’huile dans les rouages, de faciliter la fluidité des informations pour arriver bien préparés pour les négociations au niveau du groupe afin de challenger la direction, sans dogmatisme. J’exerce divers mandats : élue au CSE, au CSEC, représentante au comité de groupe, membre du directoire. Je fais également partie du conseil syndical de Chimie Lyon. En parallèle de ces missions syndicales, je suis project manager en homologation pour Bayer Crop Science. Comme Marc Legrand, toute mon équipe est située en Allemagne.
Quelle est la dynamique de la section ces dernières années ?
Pierre Duval : C’est un travail au long cours de transversalité et de partage que nous avons collectivement mené au plus près du terrain, en posant une à une les fondations. Historiquement, la CFE-CGC a toujours été largement implantée au sein de l’entité Bayer SAS et plus faiblement chez Bayer HealthCare, où nous avons ensuite enregistré des progressions très significatives avec dorénavant 7 des 13 sièges sur le CSE de Loos, contre 2 des 14 sièges lors de la dernière mandature. Idem sur le site de La Garenne-Colombes en région parisienne (radiologie et une partie des effectifs administratifs) où nous venons de passer de 11 % à 35 % de représentativité.
Défendre les intérêts des salariés et concourir à la pérennité de l’entreprise »
Nelly Enginger : Nous sommes une équipe attachée aux valeurs humaines, avec chacun-chacune nos spécificités et nos parcours. Je tiens aussi à rendre hommage à deux de nos coordinateurs, Olivier Le Moine et Thierry Verlière, qui ont contribué à valoriser l’image des organisations syndicales. Chez Bayer, la CFE-CGC est adepte d’un dialogue social constructif, à la fois pour défendre les intérêts des salariés et pour concourir à la pérennité de l’entreprise, soumise depuis de nombreuses années à de régulières restructurations. Ce sont nos valeurs, nos actions et les services qu’on peut apporter aux salariés qui nous permettent de poursuivre le développement syndical de la section, sans forcer la main aux gens.
Comment avez-vous mené campagne lors des récentes élections professionnelles, à l’issue desquelles la CFE-CGC a obtenu une majorité absolue ?
Anne Bonhenry : Un gros travail d’anticipation a été réalisé en amont, plus de six mois avant, pour constituer les listes électorales et communiquer auprès des salariés sur nos actions, nos revendications, en particulier avec une série de tracts thématiques. Nous avons saisi chaque opportunité pour occuper le terrain avec des réunions officielles, des rencontres informelles, etc. C’est fondamental eu égard à la diversité des activités et des métiers recensés dans l’entreprise.
Marc Legrand : Bayer SAS est très éclaté avec une dizaine de sites, plusieurs entités et diverses restructurations en cours. Il était donc très important, dans la constitution des listes, de mettre en avant des militants représentatifs du terrain, capables de porter notre voix et nos revendications dans les instances. C’est la force de notre section que de pouvoir aller chercher, pour tous les secteurs d’activité, des personnes en capacité de s’engager et de valoriser la qualité du travail syndical effectué. Comme l’a dit Anne, la communication est importante, centrée sur des informations concises, sur la réalité de l’entreprise et sur des argumentations sérieuses. Liberté a aussi été donnée à chaque délégué syndical CFE-CGC local d’adapter la profession de foi aux spécificités et aux problématiques de chaque site.
Yannick Lespitaou : Chez Bayer Seeds SAS (620 salariés sur 9 sites), où la syndicalisation est plus récente, les salariés ont davantage tendance à voter pour des collègues qu’ils connaissent, par exemple d’anciens représentants du personnel chez Monsanto, que pour telle ou telle étiquette syndicale. Le fait d’être bien connus et identifiés par les salariés nous permet d’avoir dorénavant des élus CFE-CGC dans 8 des 9 sites de l’entité.
Qu’en est-il du dialogue social ?
Nelly Enginger : Au niveau du groupe, peu d’accords ont été récemment signés. La CFE-CGC a refusé de signer le dernier accord relatif à l’égalité professionnelle, sans réelles avancées par rapport au précédent. En revanche, nous avons négocié et signé des accords sur les frais de santé et un accord socle relatif à l’accompagnement des plans de réorganisation (plans de départs volontaires et plans de sauvegarde de l’emploi) : formations, créations d’entreprises, cessations concertées d’activité… Il s’agit aussi de veiller sur les salariés qui restent dans l’entreprise, en termes de conditions de travail et de charge de travail. Enfin, les dernières négociations annuelles obligatoires (NAO) se sont soldées par un budget d’augmentation salariale de 4 % mais sur 9 mois, sans rétroactivité.
Négocier les meilleures conditions pour les salariés qui doivent quitter l’entreprise lors des réorganisations »
Que prévoit désormais l’agenda social ?
Anne Bonhenry : Parmi les sujets, il y aura notamment la renégociation des critères d’intéressement pour chaque entité. Au niveau du groupe, une renégociation du droit syndical doit aussi s’ouvrir afin d’harmoniser les dispositions entre les entités.
Pierre Duval : Le dialogue social pâtit mécaniquement des difficultés financières auxquelles est confrontée Bayer ces dernières années. Les marges de manœuvre ont fondu et il s’agit dorénavant davantage de défendre les acquis plutôt que d’obtenir de nouvelles avancées sociales.
Yannick Lespitaou : Je partage l’analyse de mes collègues. Chez Bayer Seeds SAS, quand on arrive en négociation, il n’y a de fait souvent pas ou plus grand-chose à négocier. Nous parvenons tout de même à signer quelques bons accords, par exemple sur la participation, l’intéressement et l’épargne salariale.
Quels sont les grands enjeux à venir pour l’entreprise ?
Nelly Enginger : Depuis 2012, Bayer en France enchaîne les plans de restructuration, plus ou moins importants. Le dernier en date, en 2020, a concerné les fonctions support des trois piliers : Crop Science, HealthCare et Seeds. Nous savons d’ores et déjà, avec la nomination du nouveau CEO de Bayer, l’Américain Bill Anderson, que l’année 2024 sera à l’avenant avec la volonté affichée de modifier profondément les organisations du travail. Tout cela occasionne forcément un gros travail syndical. Nous militons systématiquement afin de négocier les meilleures conditions possibles pour les salariés qui doivent quitter l’entreprise lors des réorganisations. 2024 sera donc agitée mais, comme d’habitude, les équipes CFE-CGC seront au rendez-vous !
Propos recueillis par Mathieu Bahuet